Le Palais GARNIER, un enjeu de distinction

Véritable écrin pour la nouvelle classe dirigeante, réunie laborieusement et après plusieurs crises, autour de Napoléon III, le Palais Garnier s’inscrit dans une logique de reconquête du Paris populaire et dangereux (Révolutions de 1789, 1830, 1848, 1871).

Directement lié et associé au Palais des Tuileries, afin de relier le Palais Impérial de Napoléon III et l’édifice dont la finalité est d’instaurer, de construire un référentiel culturel commun à l’aristocratie malmenée par les temps moderne, mais choyée par Napoléon 1er et son neveu, et la classe montante, la bourgeoisie d’affaires, de finances et d’industrie, qui n’a aucune tradition culturelle à faire valoir.

Cet édifice, compose donc avec toutes les traditions architecturales, comme avec les techniques modernes ; cet éclectisme esthétique et technique, est le pendant de la recomposition « bonapartiste » du pouvoir, associant la tradition républicaine, royaliste, l’aristocratie, l’industrie, le militarisme et la banque. Balzac et Zola, comme Flaubert, Maupassant, Sand, Stendhal et Hugo ont bien décrit cet univers.

La continuité esthétique est manifeste, de Versailles aux grandes perspectives haussmanniennes, intégrant le Palais Garnier au quotidien scénographié de la nouvelle classe dirigeante. Continuité des appartements bourgeois aux loges de l’ Opéra, en passant par la célébration du nouveau moteur de l’économie capitaliste rayonnante, les Grands magasins.

L’utilisation du métal reste une hérésie pour le regard formé par des siècles d’académie et d’architecture classique, puis néo classique en France. Ainsi, ce paradoxe, les structures métalliques sont des prouesses emblématiques du génie industriel national, mais sont connotées comme industrielles, c’est à dire bourgeoise ET ouvrières ; il est donc préférable de les cacher d’un voile de pierre et de marbre.

Ainsi, les gares aussi , sont des nécessités paradoxales : fuir la ville polluée ET amener les travailleurs et travailleuses dans la capitale. Elles seront intégrées au continuum urbain parisien, par de grandes façades scénographiées, comme celle du Palais Garnier.

Les grands magasins, commerce de luxe, mais bourgeois, reposant sur des productions industrielles et la fourmilière populaire des employés. Seront des temples, empruntant leur structure et leurs coupoles à l’Opéra Garnier, tout comme les grands escaliers, mais la façade, s’intègre à la continuité des boulevards Haussmanniens et cache le métal.

Seuls les Halles Baltard sont une présence manifeste et spectaculaire de la modernité industrielle ; peur être du fait de leur fonction triviale et nourricière. Les halles ne sont pas fréquentées par la grande bourgeoisie et l’aristocratie.

En 1889, l’édification de la Tour Eiffel sera un enjeu fondamental. Création d’ingénierie, elle s’inscrit spectaculairement dans le tissu architectural urbain d’un Paris homogénéisé par Haussmann et défie tout voile de pierre et de marbre. Ce triomphe de l’industrie et des ingénieurs change définitivement le regard sur les nouveaux matériaux industriels ; cependant, le béton connaitra quelques décennies plus tard, les mêmes polémiques quant à son utilisation en façade.Hennebique et le béton armé…

On peut se référer aussi à l’article Bren recevant sa part de butin. Paul JAMIN et l’ Académisme, pour mieux comprendre l’esthétique officielle des classes dominantes du 19e siècle.

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About Olivier Jullien

Intervenant dans le domaine des arts plastiques, comme enseignant, praticien ( peintures-graphismes) et conférencier.
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