CARNETS de VOYAGES. 1, contemporains. Retours aux traces.

Dans un univers mondialisé et hypermédiatisé, dont les réseaux sociaux et l’exhibition des moindres parcours personnels sont devenus le contenu essentiel, on observe, par le biais des carnets de voyage, un retour à la trace, à l’expérience, à une certaine rareté et authenticité. Retour aux croquis, aux ébauches, aux petites traces réelles, de papiers, d’emballages, de cartes.

Il reste un fait évident, c’est que le carnet, avec ses pages fonctionne comme un ensemble d’étapes, de pauses. Comme mémoire du voyage, il possède l’avantage de pouvoir être parcouru dans tous les sens de lecture et de proposer un nouveau voyage, à l’intérieur du voyage initial. Il tient aussi de la lettre, du courrier, du message. c’est un support qui se transporte aisément, pouvant être protégé des aléas de la pérégrinations, assez facilement.

La destination de ces carnets reste ambigüe cependant ; pour quel public ? Pour soi ?

Les lecteurs et amateurs sont variés, voyageant par « délégation », ils préfèrent ne approche subjective des lieux et territoires que l’approche encyclopédique et/ou thématique. l’esthétique assez commune des carnets étant « l’inachévé » l’éphémère, renforce l’idée d’une proposition à la place d’une injonction. l’injonction étant l’une des formes de domination de la société des loisirs : les lieux et places qu’il faut absolument avoir vu. ce qui ne veut strictement rien dire, car qu’est que « voir » un lieu ? Le vivre est autre chose. Les carnets de voyage proposent donc un « vécu », rendu explicitement sensible par des moyens spécifiques: aquarelle, croquis, collages, traces, empreintes, bribes, reliquats.

Reste néanmoins l’idée que celui ou celle qui voyage semble poser parfois comme le privilégié ou l’initié, qui a osé, qui a risqué. Les carnets sont parfois teintés d’une certaine satisfaction dont le lecteur sédentaire ne peut se prévaloir.

L’entreprise tentaculaire LVMH, a lancé de façon pertinente, une collection de carnets sophistiqués, confiés à de grands artistes graphistes, validant la poésie du voyage, si chère aux fabriquants d’articles de voyages de luxe, ici peu de traces, de visions fragiles, mais une grande sophistication dans la relation des lieux et sensations. On ne fait pas d’autostop ni de camping sauvage avec une malle Vuitton!

Al’opposé, ce début de siècle est marqué par les tragédies des migrants. Ils et elles vivent le voyage dans ce qu’il a de plus terrible, dangereux et traumatisant ; parfois leurs routes croisent celles des touristes et consommateurs. Hélas encore, ces milliers de voyageur-migrants n’ont ni les moyens, ni le temps ni l’envie de relater leurs odyssées, pourtant certainement trés édifiantes. L’artiste chinois Weï Weï a réussi un film remarquable à ce sujet : « Flow ».

Les « carnets de voyages » sont devenus un genre éditorial et artistique ; certains voyageant pour faire un carnet.

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About Olivier Jullien

Intervenant dans le domaine des arts plastiques, comme enseignant, praticien ( peintures-graphismes) et conférencier.
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