Jean COCTEAU, électron libre

Jean Cocteau, marqué à 9 ans par le suicide de son père et par la guerre dans sa jeunesse, sera toujours dans un entre-deux esthétique, politique et personnel. Cette liberté empirique le mènera à des choix déroutants pour un artiste ayant été dadaïste et proche du surréalisme, mais l’époque, les guerres, le stalinisme, le nazisme seront autant de forces terribles, fascinantes et repoussantes; Aragon sera stalinien enthousiaste, Dali catholique franquiste, après que son grand ami (et amoureux) Garcia Lorca ait été torturé et exécuté comme homosexuel républicain. André Breton restera trés strict sur une ligne théorique d’un surréalisme politique, marxiste et freudien, antifasciste et antistalinien.

Il n’en reste pas moins, que paradoxalement c’est peut-être chez Cocteau que le goût du « merveilleux », le fantastique, l’expression des désirs et de l’érotisme (homosexuel chez Cocteau), l’exploration de tous les moyens d’expression : poésie, dessin, théâtre, musique, danse, photographie, cinéma, peinture seront les plus aboutis. Cocteau fera même de sa vie une sorte de happening permanent.

Autre paradoxe, Breton, comme Aragon et d’autres, seront dérangés par l’homosexualité de Cocteau, qui cadre mal avec l’hétérosexualité fantasmée, en France des surréalistes. En Europe centrale, les femmes engagées dans les avant-gardes sont libres, la divinisation des « muses » surréalistes les enferme dans un rôle de divas muettes. Une bonne partie de ces « muses » étant d’ailleurs issues des avant-gardes slaves et germaniques. Déjà, Picabia, Apollinaire, Man Ray, H.P. RochéDUCHAMP points….lignes, plans, gaz avaient construit le cadre d’un érotisme prédateur et globalement misogyne. Leur mérite étant toutefois de faire de la sexualité et du genre un sujet non-tabouElsa Von FREYTAG LORINGHOVEN.. N’oublions pas encore que le Freudisme restera longtemps hétéronormé, considérant l’homosexualité comme une perversion.

Malgré la détestation que lui voue Breton, Cocteau restera proche de la plupart des artistes dadaïstes, puis surréalistes des débuts. Picasso et Duchamp par exemple et même Aragon. Il ne sera pas le seul à trouver dans le catholicisme une spiritualité onirique, Braque, Léger, Chagall, Matisse, Foujita entre autres travaillant aussi à des œuvres catholiques.

Il y a encore un fil conducteur dans son expression plastique, c’est le travail de la ligne ouverte, des silhouettes non fermées, en apesanteur, sans modelés ni ombres, détachées du sol. Dessinateur plus que peintre, il saura donner à son graphisme une force majeure dans ses grands décors.

Sensible à la lumière et à l’onirisme, son cinéma est sans doute à ranger aux côtés de Bunuel par exemple.

En 2eme partie de cette galerie, un ensemble de photos relatives aux années 30, mettant en scène de façon manifeste, l’approche genrée et stéréotypée des femmes dans l’univers surréaliste, avec les rues de mannequins de vitrines transformés, tout comme la vitrine de New York, mise en scène par Breton et Duchamp.

La galerie ci dessus propose aussi les peintures de Jacqueline LAMBA, femme d’ André Breton, excellente peintre surréaliste à l’œuvre cohérente et totalement ignorée.

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About Olivier Jullien

Intervenant dans le domaine des arts plastiques, comme enseignant, praticien ( peintures-graphismes) et conférencier.
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